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Réductions de prix et pratiques trompeuses : la CJUE se prononce

La Cour de Justice rappelle que les règles sur l’indication  des prix priment sur celles interdisant les pratiques commerciales trompeuses. Cette décision pourrait remettre en cause le système français qui sanctionne les manquements aux règles de présentation des réductions de prix au titre  des pratiques commerciales trompeuses.

CJUE, 26  septembre 2024 C-330/23

Quel est le contexte de la décision de la Cour de justice ?

Une association de consommateurs allemande avait contesté les promotions de l’enseigne Aldi annoncées dans ses prospectus hebdomadaires.

L’avantage promotionnel était calculé par rapport au prix barré, le dernier prix de vente. Le prix le plus bas des 30 derniers jours était mentionné en-dessous de l’encadré. Dans les deux cas, il était très inférieur au prix barré.

La juridiction allemande a demandé à la Cour de justice son interprétation des règles de droit européen applicables (question préjudicielle) pour se prononcer sur la licéité de ces promotions.

Quelles sont les règles applicables ?

Les annonces de réduction de prix en pourcentage (-50%) ou littéraires (Prix choc) doivent indiquer le prix le plus bas pratiqué par le professionnel au cours des 30 jours précédant l’offre : c’est le « prix antérieur ».

Cette règle découle de la Directive 98/6 relative à la protection des consommateurs en matière d’indications des prix des produits. Elle a été modifiée par la Directive 2019/2161. En France, elle figure à l’article L.112-1-1 du code de la consommation, issu de l’Ordonnance 2021/1734 du 22 décembre 2021 et applicable depuis le 22 mai 2022.

Comment le professionnel doit-il calculer sa réduction de prix ?

La Cour de justice précise que la réduction de prix doit être calculée par rapport au prix antérieur.

Il ne suffit pas de se contenter -comme l’avait fait Aldi – de mentionner le prix antérieur sur l’annonce et de calculer le pourcentage de réduction par rapport à un autre prix pour afficher une réduction plus importante.

Y-a-t-il pratique commerciale trompeuse en cas de présentation non conforme de la réduction de prix ?

Oui, mais cette déloyauté doit être appréciée exclusivement à la lumière du texte spécifique qu’est la Directive 98/6 et non du texte général sur les pratiques commerciales déloyales qu’est la directive 2005/29.

Est-ce que cela change quelque chose en France ?

Oui, cela pourrait changer beaucoup de choses en termes de sanctions.

Aucune sanction spécifique n’est prévue pour les violations de l’article L.112-1-1 du code de la consommation. Le législateur français a estimé que cette violation était une pratique commerciale trompeuse interdite par l’article L.121-2. 2°c) du code de la consommation et devait être sanctionné comme tel (notamment amendes jusqu’à 1 500k€ – 3 750k€ si commis sur support numérique – ou 10% du chiffre d’affaires).

Ce raccourci, non conforme au droit de l’Union, pourrait donc priver les règles relatives aux réductions de prix de toute sanction en France !

Il s’agit d’un levier de négociation non négligeable avec l’administration ou le Parquet et d’un bel argument de défense dans les procédures en cours.

Le sujet n’est donc pas tari et le traitement des plaintes de l’UFC Que Choisir déposées contre 8 sites de commerce en ligne (annonce du 31 mai 2023) pour réductions de prix non conformes ne manquera certainement pas d’intérêt.

Panta Rhei accompagne les directions juridiques et les opérationnels pour construire et défendre leurs politiques de distribution, leurs communications consommateurs et leurs choix technologiques.  

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