Luxe ou produits haut de gamme : l’interdiction des ventes en ligne à nouveau sanctionnée par l’Autorité de la concurrence

Actualité Juridique : Décisions de l'Autorité de la Concurrence

ADLC 23-D-12 du 11 décembre 2023 (thés haut de gamme) et 23-D-13 du 19 décembre 2023 (montres de luxe)

Thés haut de gamme ou haute horlogerie de luxe distribution ouverte ou sélective : il est interdit d’interdire à ses distributeurs de vendre en ligne ; il faut adapter et proportionner les restrictions.

Un principe que rappelle avec fermeté l’Autorité de la concurrence au mois de décembre 2023 en condamnant les groupes Rolex (amende infligée de plus de 91 millions d’euros) et Mariage Frères (amende de 4 millions d’euros) et en qualifiant de restrictions par objet leurs interdictions des ventes en ligne. L’ADLC souligne que les spécificités du secteur du luxe ne permettent pas de l’exempter de ces règles.

Dans l’affaire concernant les thés haut de gamme l’Autorité a constaté que :

  • Mariage Frères fonctionnait avec un réseau de distribution ouvert (non exclusif non sélectif) régi par des conditions générales de vente acceptées par ses distributeurs ;
  • Ces conditions contenaient dans un premier temps une interdiction absolue des ventes en ligne remplacée par une autorisation sous conditions sans énonciation des critères d’octroi ;
  • Elles contenaient également une restriction de clientèle : les revendeurs ne pouvaient revendre qu’à des utilisateurs finals ;
  • La marque opérait quant à elle dans des magasins détenus en propre et sur son propre site de vente en ligne.

L’autorité met en avant dans son analyse la situation de double distribution qui permettait à Mariage Frères de contrôler l’intégralité de la distribution de ses thés.

Dans sa décision concernant les montres de luxe l’Autorité a constaté que :

  • Le contrat de distribution sélective de Rolex contenait une interdiction de la vente par correspondance interprétée par la plupart des distributeurs comme une interdiction de vendre en ligne ;
  • La société interdisait ou dissuadait les ventes en ligne par des courriers et déclarations ;
  • La présence en ligne de la marque était autorisée sous conditions très contraignantes et sans vente en ligne.

Dans le même temps :

  • Les concurrents de Rolex encadrent la vente en ligne par des critères sélectifs et recourent à des technologies innovantes ;
  • Des distributeurs de la marque Rolex vendent des marques concurrentes sur leur site marchand ;
  • Les chiffres démontrent un attrait croissant des consommateurs pour l’achat de ces produits en ligne et ce canal est celui qui tire la progression du secteur ;
  • Les prix constituent un levier de concurrence puisque les clients essayent d’obtenir des remises.

L’Autorité considère que les objectifs de Rolex auraient pu être atteints par des mesures moins contraignantes :

  • Conditions et garanties pour la vente en ligne (ex : en exclure certains modèles) ;
  • Recours à la technologie Blockchain et à des certificats numériques pour garantir l’authenticité des produits achetés en ligne ;
  • Recours à des systèmes tels que l’assurance ou le retrait en magasin pour limiter les risques de sécurité des envois et retour des produits de valeur ;
  • Encadrement strict dans les CGV des retours liés à l’exercice du droit de rétractation.

Panta Rhei 2021 © Tous droits réservés